Samedi 23 mai 1789

Grand frais du S. E. et du S. S. E., avec de grains pesants et de la pluie. Les maux que nous éprouvâmes dans cette journée, surpassèrent encore ceux de la veille : la nuit fut horrible. La mer qui nous inondait avec une violence inexprimable, nous obligeait de jeter l’eau sans interruption avec la crainte de périr à chaque instant. Le jour me montra tout le monde dans l’état le plus effroyable et je commençai à craindre qu’une autre nuit semblable ne terminât les jours de plusieurs qui me paraissaient hors d’état de supporter tant de souffrances. Chacun criait et se plaignait de fortes douleurs ; je les soulageai un peu par une distribution de deux cuillerées de rhum à chacun ; après quoi, nous trempâmes et tordîmes nos hardes à l’eau de mer, nous déjeunâmes avec notre portion ordinaire de biscuit et d’eau et nous nous trouvâmes un peu mieux.

Le temps s’éclaircit vers le midi mais le vent ne diminuait presque pas et la mer était toujours également grosse. Ce fut avec beaucoup de peine que je pus observer 13° 44′ de latitude sud ; le calcul de la route me donna depuis hier midi, cent seize milles à l’O. ¼ N. O. 4° 45′ N., la longitude arrivée 31° 32′ O. de Tofô.