Samedi 16 mai 1789

Vent au S. E. bon frais et pluie ; la nuit fort noire ne permit d’apercevoir aucune étoile d’après laquelle on pût se gouverner, et la mer nous inondait sans interruption. Je jugeai très nécessaire de nous précautionner le plus qu’il serait possible contre les vents de sud, pour tâcher de n’être pas jetés trop près de la Nouvelle-Guinée. Nous étions si fréquemment obligés de fuir vent arrière, que si je n’avais pas eu l’attention de prendre du sud toutes les fois que le temps devenait plus maniable, il eût été presque inévitable, après une telle constance des vents dans cette partie, de nous voir pousser en vue de cette côte ; et dans ce cas, il était fort à craindre pour nous de terminer là notre voyage.

Ce jour-là, pour augmenter la triste portion d’un vingt-cinquième de livre de biscuit et d’un huitième de pinte d’eau, je distribuai à chaque homme environ une once de cochon salé. J’avais essuyé de fréquentes sollicitations pour cette viande ; mais je préférais de la donner par petites quantités pour la faire durer, car si je les avais écoutés, elle serait partie en une ou deux distributions.

À midi, la latitude observée fut de 13° 33′ sud ; la longitude arrivée, 19° 27′ ouest de Tofô ; la route l’O ¼ N. O. 3° 15′ O. et le chemin parcouru, cent un milles. Le soleil qui se montra, nous donna espoir de pouvoir sécher nos hardes.