Dimanche 17 mai 1789

Le soleil ne parut pas longtemps ; nous eûmes de très fortes brises du S. E. ¼ de S., avec un temps noir et couvert de nuages, des grains de pluie, des orages, du tonnerre et des éclairs. Cette nuit fut vraiment épouvantable on ne vit aucune étoile et on ne put être assuré de la route. À la pointe du jour, tout le monde se plaignait et quelques-uns demandaient une augmentation de ration, à quoi je me refusai avec fermeté. Notre état était des plus déplorables : toujours mouillés, souffrant des froids excessifs toute la nuit, sans le moindre abri, toujours obligé de jeter l’eau pour empêcher la chaloupe de se remplir ; mais cette dernière circonstance a eu peut-être un avantage, celui de nous tenir en action.

La petite provision de rhum que j’avais, nous était de la plus grande utilité ; lorsque nous avions passé des nuits désastreuses, j’avais coutume d’en distribuer une pleine cuillère à café, ou même deux par personne ; et lorsque j’annonçais cette intention, cette nouvelle répandait la joie parmi l’équipage.

À midi, nous fûmes au moment d’avoir une trombe à bord. Je distribuai une once de cochon salé avec la ration de pain et d’eau. Avant de dîner, chacun se déshabilla, trempa ses hardes dans l’eau de mer et les y tordit au moyen de quoi nous les trouvions moins froides et plus supportables.

La route depuis hier midi valut l’O. S. O. et le chemin parcouru, cent milles ; la latitude estimée, 14° 11′ sud ; la longitude arrivée, 21° 3′ ouest.