Mercredi 20 mai 1789

Brises fraîches de l’est-nord-est, avec pluie continuelle, semblable par moments à un déluge ; nous fûmes sans cesse occupés à jeter l’eau. À la pointe du jour, quelques uns de nos gens me parurent à moitié morts, leurs regards faisaient peur ; et je ne pouvais jeter les yeux d’aucun côté, que je ne rencontrasse ceux d’un malheureux dans les souffrances. On apercevait chez tous, les horreurs d’une faim extrême. On n’éprouvait du moins pas la soif, car ce besoin était satisfait, même à travers la peau. Nous n’avions pu prendre un peu de sommeil qu’au milieu des eaux, et nous ne nous réveillions jamais sans sentir des crampes et des douleurs dans les os. Cette matinée, je donnai à chaque personne, à peu près deux cuillerées à café de rhum, avec la ration ordinaire de biscuit et d’eau. À midi, le soleil se montra et nous fit tous renaître. J’observai 14° 49′ de latitude sud ; la longitude arrivée, 25° 46′ ouest de Tofô ; le chemin, soixante-quinze milles, à l’O. 2° S.