Mardi 19 mai 1789

Vent frais de l’E. N. E. et forte pluie, le toute cette journée mouillés sans cesse de l’eau de la mer et de la pluie ; et nous souffrîmes beaucoup du froid, dont nous ne nous soulagions un peu, que par moment, en quittant nos habillements et les trempant dans la mer. Nous eûmes toute cette nuit beaucoup d’éclairs, et dans les intervalles qu’ils laissaient entre eux, le temps était si noir, que nous ne pouvions pas nous voir les uns les autres. Le matin, j’entendis faire beaucoup de doléances sur la rigueur du temps et j’aurais bien désiré pouvoir distribuer la petite ration de rhum ; mais comme je craignais que nous n’eussions encore à passer de plus rudes épreuves, je préférai conserver le peu qui nous en restait pour quelque autre occasion où nous pourrions en avoir un besoin plus urgent, et être moins en état de supporter tant de maux. Pour les dédommager du manque de rhum, je leur donnai à chacun une once de cochon salé, jointe à la portion ordinaire de biscuit et d’eau pour le dîner. Nous fûmes obligés toute cette nuit et toute la journée, de jeter l’eau sans interruption.

À midi, le temps était effroyable et la pluie continuelle ; la latitude estimée, 14° 37′ sud ; la route estimée depuis hier valut l’O. ¼ N. 0.3° 15′ O. ; le chemin parcouru, cent milles ; et la longitude arrivée, 24° 30′ ouest de Tofô.